Nous avons choisi de consacrer cet articles sur l’hypersensibilité. Il nous paraissait important d’approfondir cette notion et de la décrypter avec une experte spécialisée sur ces questions et dont nous adorons l’approche !
Nous avons donc posé quelques questions à Céline Syritellis. Céline est coach parentale, fondatrice de Paizi Coaching parental. Elle accompagne les parents d’enfants hypersensibles et atypiques pour leur apporter les clés concrètes qui les aideront à retrouver un quotidien paisible tout en aidant leur enfant à s’épanouir. Bonne lecture !
Bonjour Céline et merci de nous accorder quelques minutes de ton temps ! La première question que nous avons envie de te poser est la plus basique : comment définirais-tu l’hypersensibilité et, d’ailleurs, est-il possible d’en donner une définition ?
Alors oui, on peut en donner une définition ! Les expert.es s’entendent habituellement sur le fait que les personnes hypersensibles captent beaucoup de choses de leur environnement et qu’ils font ensuite un traitement (mental) très profond de ces informations.
L’hypersensibilité se situe sur l’aspect sensoriel des choses, sur le fait de percevoir tous les stimulis de la vie, à travers tous les sens – y compris les émotions d’autrui – et de les traiter avec une grande intensité et sans hiérarchisation. On comprend donc assez bien que ce traitement particulier devient vite envahissant et peut causer des problèmes qui se ressentent, notamment au niveau comportemental.
On a l’image d’un enfant hypersensible délicat, timide, dans son coin, très empathique … Est-ce toujours le cas ? Y a-t-il plusieurs types d’hypersensibilité ?
Oui, les manifestations de l’hypersensibilité sont très diverses. On associe souvent à tort l’hypersensibilité uniquement à des personnes délicates, attentives aux émotions, qui ne parlent pas trop fort … mais c’est loin d’être toujours le cas ! Ce n’est d’ailleurs pas souvent les parents d’enfants qui ont cette forme d’hypersensibilité qui viennent vers moi, mais plutôt ceux dont le comportement de l’enfant est moins “attendu socialement”.
L’hypersensibilité, je le rappelle, est vraiment une question de sensations et il arrive donc qu’une personne hypersensible ait des réactions très brusques à des stimulis trop forts pour lui ou elle. Par exemple, j’ai déjà vu un enfant casser un aspirateur parce que le bruit lui était insupportable.
Il est même délétère d’associer l’hypersensibilité à des comportements forcément doux et délicats, car on passe alors à côté d’une grille de lecture très importante pour aider les parents en difficulté avec les comportements de leur enfant (et l’enfant lui-même bien entendu). Il n’est pas rare qu’on me dise “Il ne peut pas être hypersensible vue la façon dont il traite ses jouets, il casse tout !” Il faut alors combattre les idées reçues, réajuster, et trouver des solutions adaptées.
Pour les parents qui nous lisent et qui se posent des questions sur leur enfant, comment les orienter vers le diagnostic ? Comment être sûr.e ?
Il faut avoir en tête que l’hypersensibilité n’est pas un trouble ; il n’y a donc pas de diagnostic à proprement parler !
En revanche, il s’agit de quelque chose de très précis médicalement et elle demande une prise en charge spécialisée. Des professionnels spécialisés comme les ergothérapeutes ou le psychomotriciens travaillent beaucoup sur l’”hyper” et l’“hypo” sensibilité et sensitivité, on peut donc se tourner vers eux pour exprimer ses doutes et entamer un accompagnement.
De toute manière comme je le dis toujours, si vous avez une intuition, écoutez-vous et rapprochez vous des solutions proposées dans le traitement de l’hypersensibilité, prenez-les comme une boîte à outils. J’aime la notion de “boite à outils” car elle donne des éclairages qui calment le jeu et qu’elles donnent des pistes de solutions à tester. Je m’explique : si vous ouvrez la boîte à outils des conseils et solutions apportées à l’hypersensibilité et que certaines choses vous parlent et fonctionnent pour votre enfant et vous-même, on les garde ! Restons pragmatiques, peu importe s’il y a diagnostic ou non en fin de compte.
De plus, dès qu’on intègre l’hypothèse d’une hypersensibilité, elle donne un éclairage utile sur un comportement jugé difficile d’un enfant, et elle apaise les tensions qui peuvent exister. On passe de “Il ou elle me cherche” à “Je sais qu’il ou elle n’est pas capable de supporter cette situation” et c’est souvent très bénéfique.
J’ajouterais dans ce même esprit que les solutions mises en place sont d’ailleurs un cercle vertueux pour la famille. Si on met en place des solutions pour les enfants qu’on imagine hypersensibles, elles serviront pour les autres enfants ou adultes de la famille.
On entend parfois dire que les enfants seraient tous hypersensibles tout petits, et que cela s’estomperait en grandissant. Qu’en penses-tu ?
Lorsque l’on interroge les parents qui décrivent leur enfant comme hypersensible, ils disent avoir repéré depuis toujours ce tempérament marqué par des réactions intenses à des situations d’inconfort : pleurs fréquents et intenses pour la faim, le sommeil, la recherche de contact avec l’adulte…
Ces « bébés intenses » deviennent pour la plupart des enfants dont les réactions restent marquées par l’intensité : la sensation insupportable d’une couture trop marquée sur une chaussette, leur réaction à des situations de frustration (le « non » de l’adulte ou le fait de cesser une activité plaisante pour entamer une activité jugée contraignante), … Ce sont souvent des enfants très sensibles à des inconforts comme la sensation de faim ou la soif, ce qui impacte leurs capacités de régulation émotionnelle.
Naturellement le fait de grandir permet le développement de compétences, notamment de compétences de régulation (régulation émotionnelle, comportementale etc.) et favorise des comportements plus adaptés chez l’enfant au fur et à mesure de son développement.
Tu parles de régulation émotionnelle, évidemment au coeur de notre mission chez Pipouette. Si tu avais un conseil à donner aux parents à ce sujet, quel serait-il ?
Hypersensibilité ou pas, dans tous les cas, le travail d’identification des émotions est primordial. Dans un premier temps, nommer les émotions et les identifier avec l’enfant, puis décrire ce qu’elle produit dans le corps, sur l’humeur, dans la tête et le coeur …
Le deuxième versant, c’est de comprendre et décrypter les émotions : “La tristesse, c’est ce qu’on ressent par exemple quand on a perdu qque chose pour toujours”, “la colère c’est par exemple quand il y a quelque chose qui nous contrarie parce qu’on ne se sent pas respecté et qu’on a envie d’agir très fort pour remettre le respect”, etc.
Le but ultime de tout cela est que l’enfant s’approprie ces notions et ses émotions. Et bien sûr, la clé essentielle est la validation de l’émotion de l’enfant, toujours !
N’hésitez pas à vous aider de Pipouette pour cela.